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Observation de 2 bébés panthère des neiges en 2014 !Niveau 4

En 2014 l'un de nos groupe a eu la chance de découvrir une tanière de panthère des neiges comportant deux jeunes d'environ deux mois dans la réserve de Sarychat-Ertash ! Voir descriptif détaillé Niveau 4

Observation de 2 bébés panthère des neiges en 2014 !Niveau 4

En 2014 l'un de nos groupe a eu la chance de découvrir une tanière de panthère des neiges comportant deux jeunes d'environ deux mois dans la réserve de Sarychat-Ertash ! Voir descriptif détaillé Niveau 4

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Bébé panthère des neiges (photo de Pierre Peyret)

Dimanche 03 Août 2014 13h34 3380 m d’altitude. Quelque part dans le massif des Tian Shan .

L’émotion dans le groupe est encore palpable alors que nous posons un piège photographique dans la réserve de Sarychat Ertash au Nord du lac Yssyk Kol au fin fond du Kirghizstan. Si palpable que ni Bastien ni moi ne savons vraiment comment recevoir l’évènement qui nous tend les bras. Dans un thalweg à peine profond, sous nos pas et sans coup férir, comme souvent avec la nature, une rencontre fabuleuse vient de nous couper le souffle.

Nous avons peine à y croire, d’ailleurs pour être honnête nous n’avions rien vu venir. Pourtant depuis quelques années au côté d’OSI (Objectif Sciences International), une ONG suisse qui propose un travail scientifique participatif en collaboration avec des gardes locaux sur une réserve d’Etat de plusieurs milliers d’hectares, nous parcourons inlassablement avec de courageux participants, des gardes kirghizes dévoués et affutés, des chevaux infatigables, les sentes, les ravines, les crêtes, les drailles d’Ibex et d’Argalis , à l’affut du « fantôme des montagnes », la panthère des neiges. Un animal presque mystique, adapté à un des environnements les plus difficiles de la planète, cumulant, haute altitude, froid, falaises abruptes, proies extraordinairement vigilantes et agiles, steppes de montagne dépouillée aux dimensions inenvisageables, minérales, sans l’once d’un arbre. Curieuse chimère nous diriez vous que de partir sur les traces d’un animal dont on a peu de chance de faire la rencontre sur à peine quelques semaines, avec nos démarches pataudes, nos odeurs traitresses et poussières de cheval visibles à des lieux à la ronde ! Quelle folie penseriez vous que de parcourir nez au sol, dos courbés, jambes éreintées, peau brulée, tant de kilomètres depuis nos vies modernes et bruyantes jusqu’à ces solitudes poussiéreuses ? Pourtant nous sommes là, chaque matin, ou presque quand la pluie ne s’invite pas, quand la fatigue relâche un peu, à rechercher les indices que l’animal veut bien nous laisser sur son terrain de chasse inaccessible. Rien de ragoutant d’un point de vue esthétique pour tout vous dire, des fèces -pour nommer scientifiquement ses crottes- ça et là dispersés stratégiquement, que l’analyse « ADN » fera parler à notre retour ; des empreintes sur lesquelles nous nous perdons souvent en conjecture ; quelques jets d’urine qui nous posent les genoux à terre le nez sur le rocher, des poils restés coincés dans l’écorce d’un saule nain au creux d’un torrent capricieux.

Malgré tout nous avons un atout à notre avantage, la technologie des pièges photographiques, que les années d’erreurs pour ne pas dire d’errance nous ont enseignées à apprivoiser l’efficacité. Disposés subtilement sur les transects, ces itinéraires en crêtes que nous parcourons chaque année, ils nous révèlent parfois des spectacles photos ou vidéos qui remplissent à eux seuls une journée de prospection. Un bouquetin (Ibex) un loup, une marmotte, un rouge queue noir curieux, un pika furtif et parfois… une ou plusieurs panthères en prospection.
Voilà pourquoi ce dimanche singulier d’août nous parcourons avec un petit groupe une ravine sèche, après avoir laissé les chevaux un peu plus bas. Il fait chaud évidemment, mais le vent soulage un peu la morsure estivale. Nous progressons lentement dans les marnes, les blocs instables, parfois énormes, ce couloir qui par forte pluie peut se transformer en piège où les plantes arbustives urticantes et denses sont parfois cocasses à contourner. Le groupe se sépare en deux pour prospecter au mieux et alors que nous allions renoncer à aller plus avant, les yeux rivés sur les moindres indices de présence, Paul un des participants nous interpelle nonchalamment : « Pierre Ca te dérange si je fais une photo ? euh non pourquoi ? ».

Faisant volte face j’aperçois dans la direction de son regard, impeccablement dissimulé sous un bloc rocheux sur lequel il se tient debout, une jeune panthère des neiges (2 mois et demi trois mois maximum) qui tremble de tous ses poils, dissimulant d’ailleurs une autre panthère derrière elle. Stupéfait je préviens Bastien en contrebas, qui m’adresse un rire interrogateur en me regardant mimer naïvement une jeune panthère. La tension et la confusion sont palpables, tout se bouscule dans nos têtes, que faire ? La mère est peut être là ? Restons nous ? A quel prix ? Mettre en danger la portée des deux jeunes par notre simple présence ? Mettre en difficulté le groupe face à un prédateur dont nous ignorons la réaction ? Profiter de l’instant présent ? Quelques photos à une distance respectable sont prises et nous décidons malgré l’euphorie de poser un piège photographique à proximité de la tanière, puis de quitter rapidement les lieux afin de ne pas déranger cet animal si sensible.

A vrai dire c’est le dernier endroit où nous imaginions trouver un jour une tanière, enfin disons un abri sommaire. Le trou est si facilement accessible, et dans notre imaginaire, l’observation d’une panthère était déjà un rêve entre deux vapeurs de vodka, mais alors tomber nez à nez avec une petite famille dont la mère est en goguette… dans un endroit si accessible… C’était à peine croyable.
C’est ce qui rend les moments d’observation du sauvage toujours aussi déroutants. Ils nous replongent soudainement dans notre naïveté infantile, au milieu de toutes nos certitudes scientifiques. Et nous aurions pu à un regard près passer absolument à côté de cette rencontre, tant le camouflage était parfait. A peine un regard de félin apeuré, une babine retroussée dans un feulement feutré mais déjà impressionnant, des pattes antérieures aussi larges que la tête, quelques secondes d’observation rythmées de 160 pulsations d ‘émotion cardiaque.
Nous dévalons la pente les pieds dans les nuages, le sourire au galop.
Vite servez moi un thé bien noir, j’ai la bouche sèche.

Pierre Peyret.
OSI PANTHERA

« Pour vivre heureux vivons cachés. »

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